Parlons Hydro… Parlons énergie….

30 octobre 2024

energy, save up, electricityEn juin dernier, l’ex-ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, M. Pierre Fitzgibbon, déposait le projet de loi no 69 : Loi assurant la gouvernance responsable des ressources énergétiques et modifiant diverses dispositions législatives.Ce projet de loi visant à moderniser et à améliorer la gestion des ressources énergétiques du Québec soulève plusieurs inquiétudes, entre autres en ce qui a trait aux conséquences possibles sur les ménages à faible revenu.

En effet, considérant que 1 ménage sur 7 éprouve des difficultés financières à payer sa facture d’électricité et que l’électricité est un besoin essentiel qui sert en grande majorité à chauffer les habitations, il est primordial que le gouvernement inclue dans la loi des moyens concrets pour protéger ces ménages. Ceux-ci sont les plus vulnérables car ils n’ont pas la possibilité d’améliorer leur efficacité énergétique avec une meilleure isolation de leurs logements relevant de leurs propriétaires ou avec l’installation de thermopompe ou d’appareil intelligent s’ils sont propriétaires.

La transition énergétique passe d’abord et avant tout par la décarbonation, c’est-à-dire le remplacement des énergies émettant des gaz à effet de serre (GES) par des énergies propres. Bien que cet objectif soit louable et sans aucun doute essentiel, cela implique la fin des surplus d’électricité et une forte hausse de la demande. Le Plan d’action 2035 d’Hydro-Québec prévoit devoir augmenter sa production de 150 à 200 térawattheures, soit plus du double de ce qui est produit actuellement. Les investissements annuels d’Hydro-Québec devront donc tripler, voire même quadrupler, pour être en mesure de répondre à la demande.

La privatisation partielle à la rescousse ?

La nationalisation de l’électricité comporte de nombreux avantages sociaux. Ainsi, elle a permis au Québec le financement des services publics et la possibilité d’offrir l’électricité aux clients résidentiels à moindre coût grâce au bloc patrimonial et à l’interfinancement. Il peut être tentant d’ouvrir la porte au secteur privé pour répondre à la demande grandissante mais ce n’est pas sans danger. Les fournisseurs du secteur privé risquent de prioriser leur rentabilité économique plutôt que la mission sociale d’Hydro-Québec de bien gérer une ressource collective au bénéfice de la collectivité.

La diminution de la demande d’électricité doit se faire par des mesures de sobriété collective et d’efficacité énergétique. Une sélection plus rigoureuse des nouveaux projets énergivores est préalable au développement massif de nouvelles sources de production. Il est injuste de faire porter le fardeau de la « surconsommation » d’énergie aux ménages qui, pour la plupart tel que mentionné précédemment, l’utilisent pour combler des besoins essentiels à leur domicile. La transition énergétique ne peut être supportée à 100 % par Hydro-Québec. Les industries doivent elles aussi en assumer les coûts à la hauteur de leur consommation et des profits qu’elles font.

Modulation des tarifs ?

La tarification dynamique vise la diminution de la consommation d’électricité de 6h à 9h et de 16h à 20h pendant les périodes de pointe. En ce moment, ce mode de tarification demeure optionnel et récompense les clients qui réussissent à diminuer leur consommation alors. Bien que l’idée soit bonne, il faut s’assurer qu’elle demeure optionnelle : oui pour récompenser les ménages qui peuvent diminuer leur consommation aux heures de pointe, non pour punir ceux qui sont dans l’impossibilité de le faire en augmentant leur facture.

Le projet de loi 69 est qualifié de projet « mammouth », en ce sens qu’il est d’une grande envergure en modifiant 17 lois et 7 règlements. Il s’agit donc ici d’un très bref survol des inquiétudes qu’il suscite. En gros, il vise à faciliter et à accélérer le développement de l’offre électrique afin de permettre au Québec de doubler ses capacités d’ici 2050. Or, les nouveaux mégawatts coûteront plus cher à produire et à transporter que les anciens, ce qui pourrait doubler la facture d’électricité d’ici 2035.  

Il est mentionné dans le projet de loi que le gouvernement « pourrait » mettre en place un programme d’aide pour les ménages à faible revenu et que la hausse des tarifs résidentiels « pourrait » être plafonnée à 3% jusqu’en 2026, mais sans aucune garantie de plafonnement par la suite. Bref, le risque est grand de facturer injustement le coût de la transition énergétique aux consommateurs d’électricité, sans tenir compte de leur capacité financière, ce qui risque d’exacerber les inégalités sociales.

L’ACEF Lanaudière est membre d’Union des consommateurs, regroupement d’associations de consommateurs, qui a présenté un mémoire à la commission parlementaire sur le sujet en septembre dernier. Ce mémoire incluant 18 recommandations est disponible sur leur site internet.

En conclusion, il est essentiel de réévaluer une par une les propositions du PL 69. Un débat public s’impose afin de protéger la population et de garantir une répartition juste et équitable des coûts reliés à la transition énergétique qui prend en considération la capacité financière des différents types de clientèle (résidentiel, commercial et industriel). Parlons-en !

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